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#COVID-19 : RÉCITS DE CONFINEMENT, LA RUE PREND LA PAROLE !

Pendant cette période si particulière, la Cloche continue d'agir au quotidien, en adaptant ses actions, pour mettre en lumière le vécu des personnes sans domicile et leur donner la parole.



Retrouvez ici, chaque semaine, les témoignages de nos bénévoles sans domicile lors du confinement :


Jean-Yves, bénévole sans domicile à la Cloche Pays de la Loire, 4 avril 2020 : Jean-Yves a une quarantaine d’année et vis à la rue sur Nantes depuis 5 ans environ. Lorsque nous le contactons, il est au bord de l’eau en face de Waldeck [commissariat de Police de la Ville de Nantes] avec un copain de Rue [Yoyo] et profitent du soleil tous les deux en respectant les distances de sécurité en vigueur. « Lorsque le confinement a commencé, j’ai vu un élu de Nantes qui était à Agnès Varda [Restaurant Social de la Ville] et je l’ai interpellé et dit ce que je pensais de la situation sur le confinement pour les sans-abris. Je lui ai dit qu’ils nous laissaient crever… Le lendemain, le 115 m’avait trouvé une place dans un hôtel Formule 1 sur St Herblain [Ville de l’agglomération Nantaise]. J’ai une chambre individuelle avec deux lits. Je suis bien ! Notre situation est pas la pire, y’en a pas mal [personnes sans domicile] avec des chiens qui n’ont pas de places, pas simple de vivre dehors et d’avoir un logement lorsqu’on a un chien [20 lits ont été mis en place depuis via le 115 avec accueil de chien, Jean-Yves n’était pas au courant]. Le midi je vais toujours au restaurant social et aussi parfois à la distribution alimentaire aux Wattignies [Distribution alimentaire et kit d’hygiène proposée par la Mairie et portée par des bénévoles dont ceux de la Cloche Pays de la Loire]. La Croix rouge passe tous les soirs à l’hôtel pour savoir si on a mangé et propose si on en veut ! J’ai pas à me plaindre… Faut garder un peu de lien sinon on est vraiment tout seul ! Je garde ma liberté, je ne peux pas rester enfermé toute une journée dans un hôtel ! La rue c’est mon quotidien, ma vie. Je traine un peu avec un ou deux copains mais on est toujours à 1 ou deux mètres de distance. Je fais attention. Je suis en confinement ok ! Mais on va pas me priver de ma liberté néanmoins ! Nantes compte beaucoup sur les associations et elles ont répondu à l’appel, c’est beau de voir encore toute cette solidarité. Ce que je trouve dommage c’est qu’il faille une catastrophe comme ça pour que des solutions soient prises [Trêve hivernale prolongée, plus de places via le 115…]. Comme quoi c’est possible et à l’avenir il ne faut pas que ça retombe. Si c’est possible aujourd’hui, c’est possible demain ! Quand on veut, on peut ! » Bernard, bénévole sans domicile à la Cloche Nouvelle Aquitaine, 13 avril 2020 : Bernard, bénévole sans domicile à Bordeaux, a dû changer de lieu à plusieurs reprises, et doit parfois dormir dehors. Il est notamment passé par un Centre d’Accueil d’Urgence, dans lequel il n’est resté que quelques jours, et où les conditions sanitaires difficiles à gérer pour les « 85 » personnes accueillies l’ont inquiété. Au « Foyer » : « Je faisais attention de ne pas m’approcher des personnes avec le Covid 19. Parfois, j’ai le papier, je sors quand même, une heure… : Difficile d'appliquer le confinement sans lieu à soi. »



Rémi, bénévole sans domicile à la Cloche Occitanie, 14 avril 2020 : Rémi est en rupture familiale depuis 20 ans,. Avant le confinement, il était hébergé chez Cathy, qui tient un jardin partagé à Toulouse : « Je suis quelqu’un de souriant, sympathique, avenant et toujours disponible. J’aime particulièrement sortir et voir du monde. Je ne suis pas un solitaire ! Mais en ce moment je vais moins bien qu’avant. Je ne vois quasiment plus personne. Depuis le confinement c’est de plus en plus compliqué. Plus ça avance plus on a l’impression de reculer. Il semblerait que Le 11 mai, on doive commencer à se “déconfiner”... mais le 11 mai de quelle année ?! J’apprends à être seul mais je ne le supporte pas. Avant je sortais minimum 1 heure et demie par jour. J’avais besoin de parler avec du monde. C’est vraiment ce qu’il y a de plus difficile pour moi de ne plus avoir de lien social. Mon implication en tant que bénévole à La Cloche me manque aussi. Ca me permettait d’avoir un rythme, de me sentir utile. J’ai une boule au ventre et j’ai mal au coeur. Je suis quelqu’un de vraiment sensible. Les gens avec qui j’avais tissés des liens me manquent. La distanciation sociale me donne l’impression de devenir un ours, d’hiberner. Il y a des choses que je n’arrive pas à comprendre dans ce confinement. J’ai l’impression que les personnes les plus précaires sont complètements abandonnées. On les laisse crever de faim. On aide les entreprises, mais NOUS, ON MANGE COMMENT ? On ne peut pas enlever le pain de la bouche des gens qui n’en ont pas. A vôtre avis, la bonhomie est le plus charmant des visage ou le plus hideux des masques ?»



Joël, bénévole sans domicile à la Cloche Nouvelle Aquitaine, 15 avril 2020 : Joël, bénévole sans domicile à Bordeaux et confiné chez une personne l’accueillant, se retrouve dans une impasse qu’il n’hésite pas à critiquer : « C’est vrai qu’en général je bouge beaucoup, et là je peux plus bouger. Je suis là, et le moral est à zéro… Le problème est celui-là : on est là, on se demande ce qu’il se passe. J’ai entendu qu’une personne de ma famille serait décédé à cause du coronavirus. Et ça, ça peut faire perdre le moral à beaucoup de personnes. Mais il faut vraiment rester solidaires sur ce sujet ! On dit « on doit être confiné »… Mais les mecs de la rue, ils sont confinés où ? Et les amendes : j’ai entendu plein de personnes me dire qu’ils ont eu 135 euros d’amende ! Parce qu’ils n’avaient pas le papier. Plein de personnes ne savent même pas qu’il y a des hôtels pour ceux qui sont dans la rue. » Yohann, bénévole sans domicile à la Cloche Pays de la Loire, 15 avril 2020 : Yohan a une quarantaine d’années et vit à la rue depuis quelques années sur Nantes : « Cela fait des années que je ne fais plus le 115, il m’apporte rien. Je dors toujours dans ma tente à Vertou [ville proche de Nantes]. Le midi je vais sur les points de collecte alimentaire de la Mairie et après je déjeune dehors sur la pelouse ou dans des parcs, table de Pique-nique… Le soir je mange ce que j’ai acheté que je réchauffe dans un des commerçants encore ouverts du Réseau Carillon ou alors via les invendus du Noctambule [commerçant réseau Carillon] ou autres commerces… La dernière fois en sortant du restaurant Pierre Landais [restaurant de la Ville qui distribuait des Paniers Repas jusqu’au 8 Avril], on est allé manger nos paniers sur une table à côté du lieu tranquille à 4/5. Un véhicule de flics est passé. Il s’arrête évidement. J’avais pas d’attestation. Y’en a un qui a voulu jouer des coudes avec nous et je leur ai expliqué que j’étais dehors et que j’en avais pas besoin. Surprise ce matin [deux semaines plus tard] au courrier du CCAS, une belle amende ! Je reste informé de la situation liée au COVID via les newsletters de France Info, Presse Océan et autres médias que je reçois sur mon téléphone quand j’ai de la connexion. Je suis pas totalement déconnecté ! Je vais aussi à CAP Jeunes récupérer le Ouest France qui est plus ou moins en libre-service. »



Ibrahim, bénévole sans domicile à la Cloche Île-de-France, 16 avril 2020 : Ibrahim, bénévole sans domicile à Paris, nous parle du COVID-19 : "Ce virus est un caprice dangereux de la nature et très alarmant pour les hommes. J'ai compris par ce fléau que les caprices de la nature ne tiennent pas compte de la classe sociale des hommes et d'aucune autre différence quelconque. Quand elle est généreuse elle offre à tout le monde, et de même, quand elle est désastreuse elle fait subir tout le monde. La nature est juste envers l'homme et nous devons l'être aussi envers elle. » Giovanni, ambassadeur à la Cloche Île-de-France, 23 avril 2020 : « J’habite dans un Centre d’hébergement d’urgence depuis 3 ans. En temps normal, nous sommes 40 résidents la journée et 99 avec les personnes qui viennent dormir de 19h45 à 11h, après avoir appelé le 115. Mais avec la crise, il y a 99 personnes 24h/24h. Le lieu et le personnel ne sont pas du tout adaptés pour autant de personnes. Ça déborde ! Il n’y a qu’entre 3 et 5 personnes pour gérer les 99 personnes. Beaucoup de résidents se sentent enfermés, l’ambiance est très très tendue ! Le plus dur c’est qu’il n’y plus aucun atelier organisé et plus de salle TV. Seul le jardin reste accessible. Normalement je participe à des ateliers, jardins, relaxation, cuisine avec un chef… J’ai aidé à les mettre en place ! Mais c’est très récent, on a commencé il y a 6 mois et ça manquait toujours de lien social dans le centre... Il y a plein de bénévoles motivés et c’est vraiment important, c’est ça qui nous permet de tenir. Il y a cet ancien journaliste, qui est toujours alcoolisé, mais quand il participe à l’atelier littérature, il ne va pas boire pendant 2h et il fait des trucs super ! [...] Pour accéder à la salle de restauration, il y a beaucoup trop de queue... parfois 1h ou 1h30 parce qu’il y a moins de tables pour respecter la distance de 1m. On doit manger en 10 min, on ne prend plus aucun plaisir alors qu’avant le moment du repas c’était l’un des seuls moment sympas. Je n’ai pas entendu de dispositif d’aide en plus mis à part l’extension de la trêve hivernale de 2 mois de plus et la CAF qui va accorder plus de chômage et d’allocations exceptionnelles. Je crois que c’est tout. En tout cas, ce qui est sûr c’est qu’ils vont remettre tout le monde dehors dès que c’est la fin du COVID-19… Après le confinement, moi le premier truc que j’irai faire c’est un gros câlin à mes amis et aux bénévoles de La Cloche pour fêter ça. C’est voir des gens qui me manque le plus. Je pense que je serai pas la même personne après mais j’essaie que ça se transforme en positif ! » Un bénévole sans domicile à Lyon, 24 avril 2020 : « Je suis hébergé chez une personne à Lyon depuis le début du confinement. Elle m’a laissé son appartement jusqu’à la fin du mois d’avril. Après je ne sais pas trop où j’irai, mais pour l’instant ça va. Je m’occupe comme je peux et je continue de vouloir progresser en français. J’aimerais trouver un.e professeur.e de français pour m’aider à me perfectionner car je sais que je fais encore des fautes. Je continue à apprendre avec des applications ou sur internet. J’ai peu de contact avec l’extérieur et c’est difficile… Heureusement, j’ai mon frère au téléphone plusieurs fois par jour. C’est très important pour moi et cela me permet d’avoir des nouvelles de ma famille et de la situation dans mon pays. Je suis aussi en contact avec des bénévoles d’associations différentes qui m’appellent régulièrement, cela me fait du bien. Aujourd’hui, on doit m’apporter de la peinture pour que je puisse repeindre les murs de l’appartement. J’ai hâte de me rendre utile et de faire une activité manuelle. Ce qui m’aiderait beaucoup c’est de savoir que ma situation va évoluer et que tout ça sera derrière moi. J’espère que les choses vont évoluer positivement pour moi dans les prochains mois. En ce qui concerne mon quotidien durant le confinement, j’aimerais beaucoup pouvoir sortir me promener et voir du monde. J’aimerais aussi avoir un.e professeur.e de français pour m’aider à progresser et pouvoir parler en français tous les jours. » Samir, bénévole sans domicile à Nantes, 25 avril 2020 : Samir a une quarantaine d’années, il est en France depuis plus d’un an. Lorsque nous l’appellons, il est dans son logement provisoire. « Lorsque la pandémie est arrivée, une personne a décidé de nous héberger dans son logement vide car il est à l’étranger. Il ne peut rentrer en France pour le moment en raison de la fermeture de l’espace Shengen. Ce qui nous arrange pour nous ! Au début j’ai fait le 115, 4/5 fois mais il n’avait pas de places, c’est la même routine avec eux alors j’ai arrêté… Comme on a une situation provisoire [ils sont deux dans le logement], j’ai laissé ma place à d’autres qui en auraient plus besoin que nous. C’est dur pour certains, ils sont encore beaucoup dehors ! Je voulais remercier les associations pour leur engagement et leurs actions avec la Mairie pour la distribution alimentaire et produits d’hygiène mise en place. Cela me permet de me nourrir convenablement. C’est beau cette solidarité ! Aujourd’hui, je ne vais plus à la distribution car le Ramadan vient de commencer et avec les denrées des Restos du Cœur, nous nous préparons à manger pour le soir seulement et avons plus besoin de déjeuner le midi. Ce mois est particulier pour nous, on se repose, on oublie toute notre vie matérielle et on se consacre à la spiritualité. Cela nous convient d’avoir un toit pour ces moments-là et ne nous dérange pas plus que ça d’être en confinement donc ! J’espère à des jours meilleurs demain pour avoir une situation plus stable et être régularisé. Certains pays comme l’Espagne et l’Italie l’ont fait pour avoir de la main d’œuvre en partie dans le maraîchage. J’ai voulu travailler là-bas et j’en ai contacté certains mais cela n’a pas été possible en raison de ma situation et du nombre de volontaires. C’est complexe car nous n’avons même pas eu le droit aux chèques services proposés par le CCAS et donc je n’ai aucune ressource [Samir n’a pas le RSA]… Heureusement qu’il y a les aides alimentaires. On attend donc l’après confinement que les choses bougent au niveau du gouvernement, qu’ils s’ouvrent un peu plus et que l’aile gauche et ses idées soient entendues et au rendez-vous. Je suis pressé aussi de pouvoir réaliser des sorties, animations avec les différentes associations comme La Maison Bleue, La Cloche, Les Eaux Vives… lorsque la situation sera de nouveau normale. Le lien social est important pour nous. S’ouvrir, faire du sport, voir autres choses, découvrir d’autres personnes, échanger… tout ça me manque ! Ça nous permet de nous évader et changer notre quotidien ! » Clen, bénévole sans domicile à Nantes, 27 avril 2020 : Clen a 44 ans, il vient du Congo et est arrivé en janvier 2019 à Nantes. Il est demandeur d’asile, et après avoir été accompagné par l’association JRS pour son hébergement, il est maintenant dans une colocation à côté de Nantes. « Au début du confinement, j’étais encore hébergé dans une famille, mais l’accompagnement devait s’arrêter fin mars. Je n’avais pas envie de revivre l'expérience du 115. Heureusement, j’ai trouvé cette chambre à louer, je suis content de cette solution. Nous sommes 5 et nous sommes originaires de régions proches, alors on peut se parler dans notre langue. Des amis m’ont donné un lit, une armoire, il ne me manque que la télévision pour que les journées passent plus vite. Mais en attendant le déconfinement, il faut être patient. Mes journées sont rythmées par les restos du cœur où je vais chercher de quoi me nourrir, un peu de foot dehors pour prendre l’air, et des coups de mains à une famille chez qui j’ai été hébergée, qui me demande aussi parfois de l’aide pour leur jardin. Ils viennent me chercher et j’y passe la journée, ça fait du bien de voir du monde et se sentir utile. Je cuisine un peu aussi, hier j’ai fait des feuilles de manioc pour tout le monde. Un colocataire m’a gentiment partagé sa connexion Internet. Ainsi j’ai des nouvelles de mes enfants au Congo, ils sont eux aussi confinés mais ils vont bien. Il y a quelques cas là bas aussi. Ma demande d’asile est en suspend car France Terre d’Asile est fermé pour l’instant. On verra si j’ai du courrier le 12 mai. » Ludo, bénévole sans domicile à Paris, 2 mai 2020 : Ludo est bénévole à la Cloche Paris depuis quelques années déjà. Aujourd'hui, il a voulu exprimer son vécu par un slam intitulé "Merci à vous" : "Si j’ai pris mes stylos et me suis mis à écrire ce petit slam, C’n’est pas pour dégueuler Ma haine envers cet Etat sans âme ! Ni même pour crier mon mal-être, ma rage ou je ne sais quoi ! Mais plutôt pour vous dire “Merci à vous !” qui êtes là pour nous ! Je pense en priorité à tout le corps et le milieu hospitalier, D’avoir mis familles et vie privée de côté pour être au taquet ! H vingt-quatre, ils sont présents, oubliant même de se reposer, Ils sont à nos chevets, en oubliant qu'eux aussi peuvent être touchés ! Merci aussi aux commerçants de rester ouverts en cette période, Afin de nous permettre de continuer à avoir un semblant de vie. Pour les produits de premières nécessités et bien d’autres choses. Alors merci à vous les boulang’ries, les épiceries, les Franprix ! J’n’oublie pas non plus les assos qui sont sur tous les terrains… Qui nous permettent de s’alimenter et cela tous les jours… C’est pas grand chose, mais par ces temps on s’en contente, Alors merci Coluche ainsi que tous les autres… Bien l’bonjour ! C’était Anarko System en direct sur “Radio-bitume”... Qui dédicace cette gentille et douce petite poésie… Ecrite avec un frangin et bien entendu ma douce Bonnie, Sur la seule et unique radio qui donne la parole à la rue !"


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